Virus d'autrefois

 

La peste bubonique de 1348 qui décima une partie du canton de Vic-en-Bigorre, la grippe espagnole qui sévit en 1918-1919, le VIH (Sida) (1983) et autres virus meurtriers : SRAS (2003), H1N1 (2009), Ebola (2014-2015), Dengue (2014), Coronavirus (Covid-19) d'aujourd'hui, m'ont rappelé les maladies épidémiques du XVIe au XVIIIe siècle, communément appelées "pestes" par le peuple Bigourdan.

 

 

L’Epidémie au XVIIe siècle

 

« De la peste, de la famine et de la guerre, délivrez-nous ». Cette invocation venue du latin était la préférée de mon ami Joseph Verley, Économe et historien de l’Hôpital de Vic-en-Bigorre, qui traita des maladies et des médecins de la Ville, du XVIe au XIXe siècle. Par ce temps de virose, je pioche hardiment dans son étude. Au XVIIe siècle, la famine, ce sont les mauvaises récoltes et les pauvres qu'il faut secourir. La guerre, c’est surtout le logement des gens de guerre : simple passage en été, cantonnement en hiver, avec toutes les exactions qui s'ensuivent. En 1590, la « maladie » ou la « contagion » sont là. Les mots peste ou pestiférés apparaissent. À l'époque, la peste désigne toute maladie épidémique. Il y a un cas douteux : en août 1616, Guillaume Colomès est mort d'une maladie qui a emporté son cheval, on lui a trouvé « des charbons au visage ». La fréquence des cas de guérison, le nombre limité des victimes, la recrudescence annuelle, en août et septembre, l’insistance à brûler les linges « infectés », font plutôt penser à une infection intestinale, genre choléra ou typhoïde, dont on retrouve des exemples à l'époque moderne : 1792, 1832, 1898 où le mot de typhoïde est prononcé. La proximité des puits et des fosses d'aisances suffirait à expliquer le caractère endémique de la maladie. Les méthodes pour venir à bout de l'épidémie étaient plutôt brutales. Les maisons des malades étaient, soit « désinfectées » mais par quels moyens ? Soit brûlées. Les malades étaient envoyés en quarantaine dans des cabanes, au « Grand Bois », route de Pau ou au « Marmajou ». En septembre 1590, la contagion persiste : « parce que tandis que l'on entretient Moret et Péchin, elle augmente et continue ». Le Conseil décide alors de faire périr Moret et Péchin avec « ensemble leurs femmes ». L’affaire est tout de même exceptionnelle. Les membres du Conseil veulent se couvrir par un plébiscite. Les dizainiers feront chacun le tour de leur dizaine (quartier) pour avoir l'avis du peuple. Ils reviennent le lendemain : « quy ont esté confirmés d'advis que lesdits Moret et Péchin et leurs femmes fussent mis à mort pour esviter que le reste du peuple ne périsse à leur occasion ».

 

L’Epidémie à Vic-en-Bigorre

 

En décembre 1590, la maladie persiste. On enjoint à Arnaud Despaux « tisnier » (tisserand) de se remettre aux cabanes « à peyne qu'il sera permis de le massacrer faute de ce faire et que néanmoins tous les meubles quy se trouveront dans sa maison seront bruslés ». Pour Menjolou Lalanne, il doit seulement s'enfermer dans sa maison avec sa mère, ses enfants et domestiques « à peyne d'être permis de les massacrer à faulte de vouloir obeyr ». Déjà, on ne plaisantait pas avec le confinement ! Mais alors, pas du tout... En février suivant, « vu le temps des neiges », on permet à Peyrot de Darré, en quarantaine aux cabanes, de revenir dans sa maison « sans hanter personne ». Mais la neige finie, il devra s'en retourner aux cabanes finir sa quarantaine. Même les morts sont repoussés loin de la ville : ils n'ont pas droit au cimetière, on les enterre dans le champ d'Arnaud Lalanne. Dubertrand, le « corbeau » qui a procédé à ces inhumations sera récompensé de son zèle, en 1656, par la place d'hospitalier. Mais en période d'épidémie, l'Hôpital lui-même se ferme aux malades. Le 3 août 1638, « Comme le grand nombre de pauvres qui passent en cette Ville pourraient nous porter maladie à cause que le mal contagieux est en divers lieux, l’Ospital sera fermé dès aujourd'hui avec inhibition à l’Ospital de loger personne ». Les riches, eux, s'enfuient. Lors de l'épidémie de 1655, M. de Pujo s'est retiré dans sa borde au-delà de l'Adour, Monde, notaire, est à Saint-Lézer, Lalanne, médecin de la Ville, s'est enfui à Nouilhan, Junca, autre médecin, et Costabadie, apothicaire, ont aussi quitté la Ville. Ce qui souligne le caractère très localisé de l'épidémie. Quand il faut désigner des délégués aux États de Bigorre, les Consuls restés en Ville n'y sont pas admis de peur de la contagion, mais on y envoie MM. De Pujo et Costabadie. La contagion revient en 1628,  1632, 1636, 1638, 1655. Jeanne Rotgé, l'épouse de Raimond Lafargue, le notaire à qui nous devons l'inventaire des titres de l’Hôpital de Vic-en-Bigorre, en 1645, mourra de la peste dans une cabane au bord de l'Adour, en juin 1655, après avoir testé en faveur de l'Hôpital. C'est Jean Larcher qui nous l'indique.

 

L’Epidémie vient d’ailleurs

 

À chaque fois, la maladie arrive de l'extérieur : « Comme la contagion est en divers lieux de la Gascoigne - Comme le bruit et alarme sont grands en cette Ville et aux environs que la contagion est fréquente dans Tholoze et autres lieux » (été 1628). En 1632, elle arrive de Pontacq ; en 1655, elle arrive d'Artagnan. Aussitôt, on déploie des gardes aux entrées de la Ville : « à la Monjoye de Portassau qui est sur les advenues du chemin de Tholoze » et aux deux ponts de l'Échez, aux chemins de Baloc, Artagnan, Rabastens, Silhac, Tarbes et Baradat. Impasse aujourd’hui, les marchands de sel de Pontacq arrivaient par le bois du Baradat. Le marché se tient loin de la ville, au pont de l'Adour. Les maisons vides de contagieux aux cabanes sont convoitées, les maraudeurs sévissent. On les poursuivra, non comme voleurs, mais comme « semeurs de peste » (mai 1655). Que les gens d'Artagnan, ces pestiférés, ne s'avisent pas d'essayer d'entrer en Ville : « mesme en cas il en seroit trouvé aulcun dans la Ville de les chasser à coups de fusil et de les y tuer » (juin 1655). D'autres maladies ont pratiquement disparu. En novembre 1603, on signale qu'un « ladre », natif de la Ville, s'est retiré dans sa maison natale. Peut-être n'a-t-il qu'une maladie de peau sans rapport avec la lèpre ? À Vic-en-Bigorre, il y a « une maison destinée à loger telles gens », elle n'a plus de toit, « et en danger de tomber totalement en ruine ». On va la réparer aux frais de la Ville pour y loger le « lépreux ». C'est à propos de ces épidémies que nous trouvons les premières mentions de médecins ce qui n’exclue pas leur présence avant. Dès février 1590, un nommé Maurès est logé dans la maison de Capgros, à charge de « désinfecter les maisons infectées ». En août, on le qualifie de médecin et on lui donne 200 livres pour ses soins. En septembre, on cherche à Toulouse « quelque sirurgien pour panser les pestiférés et attainz de la contagion ». Pendant trente ans, on paiera pendant un an ou deux un va-et-vient de médecins ou chirurgiens, puis qui disparaissent. En janvier 1604, un chirurgien venu d'Espagne reçoit 50 livres.  

 

Médecins ou chirurgiens ?

 

La frontière semble floue entre médecin et chirurgien. En août 1616, on parle de Lussy et Abadie, médecins ; dix jours plus tard, le même Abadie est dit chirurgien. À partir de 1621, la situation est plus stable ; il y a deux médecins : Baffier et Junca et un chirurgien, toujours le même Abadie, qui se mettent à trois pour Baraguet, sa femme et ses enfants « chargés de vérole ». Junca sera encore mentionné en 1655, mais ses rapports avec la Communauté seront toujours orageux ; son traitement sera plusieurs fois supprimé puis rétabli, ou bien encore il devra le partager avec un collègue. Une fois, il est précisé que c'est le collègue Baffier qui percevra le traitement des mains du Receveur à charge de reverser sa part à Junca. Dans les périodes où un traitement public est refusé à Junca, il faut bien supposer qu'il exerce sa profession à titre libéral. En 1628, Baffier n'est plus là ; on ne souffle mot de Junca. On cherche un « médecin capable et expérimenté ». On propose Capparoy, de Tarbes, ou encore un médecin de Saint-Sever en Gascogne « où il y a quatre fameux médecins ». Capparoy ne vient pas. On se met en rapport avec le sieur Lafont, médecin de Viella, dans le Gers, puis avec le sieur Mathou, de Samatan, mais celui-ci meurt un mois plus tard. Ce n’est qu'en février 1632 qu'on trouve le sieur Lalanne qui a écrit pour annoncer son arrivée pour le Carnaval. En fait, il n'arrive que le 2 mai, avec une pleine charrette de livres, dont la Ville paiera le transport : coût 11 livres. En 1636, les États de Bigorre qui, jusque-là, finançaient deux médecins à Tarbes, un à Bagnères, Lourdes et Vic-en-Bigorre, en ajoutent un à Rabastens : les 100 livres attribuées à Vic sont partagées : 40 pour Rabastens, 60 pour Vic. On proteste bien sûr. Le Conseil fixe alors à 300 livres le salaire de ses médecins : 150 livres pour chacun. Les 10 écus petits de l'Hôpital sont désormais attribués non plus au médecin, mais au chirurgien. Pour l'Hôpital, le barème restera inchangé jusqu'en 1780, pour près de 150 ans. Par contre, la part de la Ville et celle des États subiront de nombreux à-coups. Désormais, à Vic, on trouvera un ou plusieurs médecins « libéraux ».

 

La chirurgie… Un art mineur ?

 

Les chirurgiens sont alors le grade inférieur de la hiérarchie médicale. Il faut les situer au niveau des infirmiers actuels : ils font des pansements, des saignées, réduisent des fractures, prescrivent des bandages pour les hernies. Les clystères sont-ils de leur ressort ? En 1793, le citoyen Druaut, perruquier, a les « seringues » dans son matériel professionnel. Et les opérations ? Les chirurgiens de Vic-en-Bigorre ne semblent pas s'y risquer. Pour le cancer du charpentier Gaillard, on s'en remet à Duco, un chirurgien de Tarbes. En 1716 : « Adorret, curé, a représenté à l'Assemblée qu'il y a Jean Bénac, pauvre garçon qui demande le secours qui luy est nécessaire pour prendre un mestier de chirurgien, ce qu'il ne sauroit faire qu'avec le secours que l'Opital pourra luy donner... ». On donnera trente livres, payables en trois fois, au maître qui le prendra en charge ; la formation durera trois ans. En 1748 : « Le sieur Valette s'engagera d'apprendre l’art de chirurgien, en bon père de famille, à un jeune apprenti ». On trouve des chirurgiens à la campagne : Cazaubon à Artagnan ; puis, un sieur Morlan. Aussi à Montaner, à Tostat. Depuis Laconstance « sirurgien de la peste », en 1655, il n'y a plus de chirurgien de la ville à Vic-en-Bigorre. Seul l'Hôpital en rémunère un. Les gages modestes de 13,10 livres sols n’attirent pas autant les convoitises que les 250 ou 300 livres attribuées au médecin de la Ville. En 1717, c’est le sieur Rocques qui est depuis longtemps chirurgien de l'Hôpital. Il restera titulaire du poste jusqu'au 20 juin 1751. Puis son fils, un autre Rocques, le médecin, mais entre 1751 et 1770, on a un peu l'impression que l'Hôpital est devenu l’affaire de cette famille. On décide que le poste ne doit pas être la propriété d'un titulaire et on établit l'alternance avec Arnaud Cazaubon. En 1786, Giffard, après trois ans d'apprentissage chez Duco, ira faire de véritables études à l'école royale de chirurgie, à Paris ; ce qui explique qu’il donnera des cours d’accouchement et d’ostéologie à son retour. Le rang social de ces chirurgiens paraît très variable. Les uns sont dits « maîtres-chirurgiens », d’autres, chirurgiens, tout court.

 

L’indiscipline des chirurgiens

 

Le métier de chirurgien s’apprend donc en trois ans ; c'est la durée des apprentissages de tailleur ou de cordonnier. Par contre, il faut cinq ans pour former un arquebusier ou un faiseur de bas. Le nouvel hôpital ouvrira ses portes en mars 1787. Dès octobre 1786, on se préoccupe de l'encadrement : « M. le maire ayant représenté qu'il est important pour l’intérêt des pauvres d'avoir un bon chirurgien aux gages de l’hopital ». La contagion arrive parfois de loin. En 1707, dans la bataille d’Almanza (province d’Albacete, royaume de Valence, en Espagne) des prisonniers Portugais arrivèrent en transit à Vic-en-Bigorre et la maladie fit un ravage « extraordinaire » en cette Ville. Guillaume Ganderatz, médecin de Tarbes, fut sollicité par les vicquois et accepta malgré sa connaissance « des maladies venimeuses à Vic ». Il fut emporté par « cette espèce de peste ». Cet acte était courageux car des confrères fuyaient à la moindre alerte de contagion… En 1813, le désordre et le gaspillage se sont installés dans l’Hôpital. On remplace l’hospitalière par une personne plus énergique, Mlle Durand, à qui on donne le titre de directrice. À peine arrivée, l'orage éclate. La Commission du 19 décembre « instruite que des discussions tumultueuses ont eu lieu dans le dit hospice, à suitte desquelles Mlle Durand a fait connaître l'intention où elle était d'abandonner l’établissement si l'administration ne prenoit des mesures telles que chacun se restreigne dans les bornes des devoirs qu'il doit remplir ; que malgré la longue habitude qu'elle a pour donner les soins nécessaires aux malades qui lui sont confiés et son vif désir de faire le bien, elle ne pourroit y parvenir parce que vexée tous les jours par les chirurgiens, elle ne sçauroit se prêter à des dépenses inutiles ; que les officiers de santé-chefs ont seuls le droit d'ordonner les remèdes et le régime des malades et blessés ». Les aliments du régime autres que la soupe et le bouilli, connus sous le titre de légers, consistaient en œufs à la coque, pruneaux, lait simple, bouillie au lait, panade, riz au gras et riz au lait, et ne pouvaient être ordonnés qu'à ceux qui étaient à la demi-portion et au-dessous. 

 

Un chirurgien Espagnol

 

En décembre 1814, Mlle Durand est remplacée par les Sœurs de Charité. 1815 : nouveau conflit. Une lettre du 27 décembre, du Sous-préfet du premier arrondissement des Hautes-Pyrénées, adressée à M. le baron de Lengros, maire de Vic-en-Bigorre : « Monsieur le Baron, les dames hospitalières de l'hospice de Vic ayant dénoncé à M. le Préfet le sieur Giffard, chirurgien dudit hospice, comme s'étant permis des procédés outrageants pour ces dames, j'ai entendu le sieur Giffard et son langage passionné ne m'a que trop confirmé les torts dont on l’accuse. J'en ai fait mon rapport à M. le Préfet. Ce magistrat désirerait ainsi que moi qu'il fut pourvu au remplacement du sieur Giffard par l'administration de l'hospice de Vic. Je vous prie en conséquence, Monsieur le Baron, comme président de convoquer au plutot les membres de la commission administrative, leur communiquer ma lettre et de faire choix d'un chirurgien pour l'hospice, dont la nature du caractère coïncide avec celle des fonctions qu'il doit exercer. Je laisse à votre Sagesse et à celle de la Commission de statuer sur le choix que j'ai l'honneur de vous proposer. Recevez, M. le maire, l'assurance de ma parfaite considération ». Signé de Gavot. Le Sous-préfet avait proposé Rovira pour remplacer Giffard. Il vient se présenter le 7 janvier 1816 : « ....S'est présenté M. Rovira, chirurgien espagnol habitant de cette ville, invité par M. le maire de se rendre à cette séance à l'effet de faire connaître à la commission le diplôme qui lui donnait en Espagne le droit d'exercer la chirurgie ; il a observé qu’il lui était impossible de communiquer ces pièces à la Commission les ayant perdues par suite de la guerre d’Espagne (1808-1814) mais qu'il croyait pouvoir y suppléer par un état authentique de ses services et fonctions dans les différents grades auxquels il a été successivement promu, Il a de suite communiqué cette pièce à la Commission ainsi qu'un certificat qui lui a été accordé par les officiers du régiment de Chevaux-légers près lequel il était employé lorsqu'il fit sa résidence à Vic et duquel il résulte que le sieur Rovira réunit à de bonnes mœurs les connaissances les plus exactes de la chirurgie ».

 

Médecins, chirurgiens, apothicaires

 

« La Commission, vu toutes ses pièces, connaissant que le dit Rovira et par la douceur de son caractère et sa connaissance chirurgicale, remplira avec zèle les fonctions de son état dans l'hospice de cette Ville ». Après les disputes avec Giffard, on insiste sur la douceur du caractère de Rovira. Les justifications de ce dernier seront acceptées par le Préfet qui le nomme « médecin opérant près l'hospice de Vic » et Beauté, docteur en médecine, « médecin clinique de l’hospice ». En septembre 1830, ce dernier refuse de prêter le serment au roi Louis-Philippe et démissionne. Rovira semble bien rester seul. Il a dû obtenir sa naturalisation, car en 1848, il est membre du Conseil municipal ; il signe : « Dr Rovire ». Norbert Rosapelly nous dit qu'il n'avait jamais pu se débarrasser de son accent espagnol ce qui lui valait les risées de ses confrères. Il restera médecin de l'hospice jusqu'à sa mort en 1853, soit 37 ans de service. Son neveu, le docteur de Noyers le remplacera. À la mort de ce dernier, ce sera le docteur Adolphe Lasserre, nommé en 1868, qui sera toujours là pour soigner les blessés de l'Hôpital militaire de 1914 et 1915. Une carrière de 47 ans ! Les drogues d'apothicaire sont fort chères. À cette époque, les aumônes sont de trois sous par jour et les salaires vont de trois sous pour les femmes à six sous pour les hommes. En 1643, c'est le chirurgien Combessies qui présentait un « rolle » pour fourniture de médicaments aux pauvres de l'Hôpital. En 1655, on ne sait si les apothicaires de la Ville ont assez de drogues et de médicaments pour soigner les malades de l’épidémie. L'apothicaire Costabadie s'est prudemment mis à l'abri à la campagne ; Manaud Carrère et Perrey sont restés en Ville, ils ont fourni des médicaments aux malades, l'un après l'autre et viennent en réclamer le paiement au Conseil. Ceux qui peuvent payer paieront et l'Hôpital paiera pour les pauvres. Il est loin le temps où le vieux médecin Laffeuillade exerçait gratuitement, depuis 27 ans, faisant don à l’Hospice des 150 F inscrits au budget pour son traitement annuel. Il deviendra maire de Vic en 1830, et encore membre de la Commission administrative en 1835.

 

Les « drogues » des apothicaires

 

Les drogues d'apothicaire étaient fort chères. Le simple pot de tisane, qui représente la valeur d'une journée de travail, est donc inaccessible aux pauvres sans les charités de l'Hôpital. Quant au contenu des ordonnances, nous retrouvons deux des éléments de la trilogie moliéresque : purgare, saignere, clystérium donare… Seul l'opiate de kina introduit une nouveauté. Au 1er janvier 1702, chez M. Carrère, apothicaire, les préparations sont les suivantes : Pour un pauvre homme nommé Lapeyrade : une médecine purgative suivant l’ordonnance = 1 livre 10 sols. À partir  du 8e jour, pour une femme à l’Hôpital, une prise de poudre de rhubarbe et muscade torréfiée suivant l'ordonnance = 18 sols. À partir du 16e jour, une médecine purgative et fort composée suivant l’ordonnance = 15 sols, plus une médecine purgative suivant la même ordonnance = 1 l 10 sols, plus deux onces d'opiate de kina suivant la même ordonnance = 2 l 10 sols. À partir du 12 février, un clystère laxatif et émollient suivent l’ordonnance = 15 sols, plus une médecine purgative suivant la même ordonnance = 1 l 10 sols, plus au 20e jour, une médecine fort composée suivant l’ordonnance = 1 l 10 sols, plus un pot de tisane composée suivant l’ordonnance = 8 sols, plus une fiole sirop capillaires pesant quatre onces suivant la même ordonnance = 16 sols. À partir du 25e jour, son pot de tisane réitérée = 6 sols. Au 26e jour, sa tisane réitérée = 6 sols.  Au 27e jour, son pot de tisane réitérée = 6 sols. Au 28e jour, sa tisane réitérée = 6 sols. J’ai bon espoir qu’à la fin de la purge, la dame de l’Hôpital aura retrouvé le sourire ! L’apothicaire offre « de fournir des remèdes au prix qu'il les a achetés par un principe de charité ». Ce n'est que le 21 juillet 1788, qu'on se préoccupe du problème des médicaments. On les achètera en gros : « pour éviter la dépense énorme à laquelle donnerait lieu la fourniture des remèdes tant pour les malades de l'Hôpital que pour les autres pauvres de la Ville auxquels on en fournit dans leur logement ». On s'adresse à Préville « marchand droguiste » à Tarbes, en 1789. Désormais, les apothicaires sont devenus pharmaciens de 1re classe ou de 2e classe. Merci à Joseph Verley.

 

 

Textes et collection cartes postales Claude Larronde

 

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© Claude Larronde